La baisse des financements américains affecte la riposte contre le VIH dans plusieurs pays africains. Parallèlement, les avancées de la recherche renforcent les espoirs d’une guérison fonctionnelle.
La greffe de cellules souches: une preuve de concept, pas une stratégie de masse
Une dizaine de patients dans le monde ont bénéficié d’une greffe de moelle osseuse provenant d’un donneur porteur d’une mutation génétique rarissime (CCR5-Δ32) qui rend les cellules immunitaires résistantes à l’entrée du VIH. Cette mutation apparaît chez environ 1% de la population d’ascendance nord-européenne. Entre 10 et 18% des personnes d’origine européenne portent une seule copie (hétérozygote) de cette mutation, ce qui ralentit la progression de l’infection mais ne confère pas l’immunité
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Le problème est que la greffe de cellules souches est une procédure lourde : taux de mortalité d’environ 10%, durée d’hospitalisation et de récupération de plusieurs mois, voire d’une année, et effets indésirables potentiellement graves. Ce traitement ne peut donc pas être proposé à tout le monde, mais seulement aux personnes vivant avec le VIH qui développent un cancer hématologique nécessitant une greffe.
La thérapie génique: le ciseau moléculaire CRISPR et le défi du coût
Si les traitements injectables représentent le présent, la thérapie génique constitue la frontière de la guérison fonctionnelle et, potentiellement, de l’éradication du VIH/sida.
La technique CRISPR/Cas9 (EBT-101 et dérivés) : cette technologie agit comme un ciseau moléculaire très précis. Elle cible spécifiquement l’ADN du VIH qui se cache dans les réservoirs cellulaires, notamment les cellules CD4+ au repos, là où les trithérapies classiques ne peuvent pas l’atteindre efficacement. Les essais précliniques sur des modèles humanisés et chez le primate non humain ont montré que CRISPR/Cas9 pouvait éliminer le provirus VIH intégré au génome humain. Un essai clinique de phase 1 avec EBT-101, incluant six participants vivant avec le VIH et ayant une virémie supprimée, a démontré une bonne tolérance et un profil de sécurité acceptable, mais n’a pas empêché le rebond viral chez les participants après l’arrêt du traitement antirétroviral, suggérant qu’une seule dose reste insuffisante.
La modification des cellules B et les anticorps neutralisants à large spectre (bNAbs) : cette approche consiste à modifier génétiquement les cellules B du patient afin qu’elles produisent en continu des anticorps largement neutralisants (bNAbs) contre le VIH. Des études récentes ont montré que des cellules CD34+ de sang de cordon humain pouvaient être éditées au niveau du gène CCR5 pour conférer simultanément une protection cellulaire et systémique contre le virus.
Le problème du coût

La difficulté majeure reste le coût des thérapies géniques. Le CRISPR/Cas9 approuvé par la FDA pour traiter l’anémie falciforme et la bêta-thalassémie (Casgevy) coûte environ 2,2 millions de dollars américains par patient pour un traitement unique « one shot ». Pour le VIH, les projections laissent entrevoir un coût au moins équivalent, voire supérieur, en raison de la complexité supplémentaire (modulation immunitaire, réservoirs multiples).
À titre de comparaison, le lenacapavir intramusculaire générique, beaucoup plus abordable que la thérapie génique, pourrait être produit pour environ 40 dollars par personne et par an pour la prévention des infections VIH, mais cela suppose un accès réel aux versions génériques et un financement adapté.
Euclide OKOLOU

